Maripa-Soula

Vos guides du passé
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■ Vos guides du passé

Les premiers guides touristiques, au sens où nous l'entendons actuellement, sont nés avec le développement du chemin de fer. Contrairement aux récits de voyages qui se limitaient aux parcours réalisés, les guides touristiques fournissent multiples informations sur les lieux et destinations que vous souhaiteriez visiter.

Les Guides Touristiques du Passé sont plaisantes informations et, nous permettant de visiter nos communes avec les yeux de nos aïeux, peuvent nous en apprendre beaucoup sur leurs goûts et sensibilités.

Maripa-Soula

maripasoula


  • FrançaisMaripa-Soula
  • Kriyòl gwiyannenMaripa-Soula
    ( Créole - Guyane )
  • Population9 768 hab.
    GentiléMaripasouliens
  • Superficie18 360,00 km²
  • Densité0.53 hab./km²
  • Latitude3° 38 '27" N°
    Longitude54° 2 '41" W°
  • Latitude3.640823°
    Longitude-54.028053°

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Île de Chikotan: Traitement des algues en 1935

⌘ Maripasoula en 1947

N'ayant retrouvé aucune trace de Maripasoula dans les anciens Guides touristiques en notre possession, nous vous recopions la lettre écrite par le Révérend Abbé A. Bessac, prêtre spiritain nommé à Maripasoula en 1947.

Maripasoula, Haut-Maroni, ce 21 Juin 1947

Les Annales, adressées à l’Oyapok, sur la frontière brésilienne, sont venues me joindre, après quatre mois et demi de voyage, à l’autre extrémité de la uyane, sur la frontière Hollandaise.

Après avoir assuré durant vingt-et-un mois l’intérim de Régina-Approuague, j’ai pu enfin, au retour du titulaire en mars dernier, mettre le cap sur le Haut-Maroni, nouveau poste que Son Excellence Monseigneur Marie a bien voulu me confier.

Il fut un temps où l’on gémissait, aux Annales Spiritaines, sur le silence des Vieilles Colonies devenues depuis, paraît-il, des Départements français. Les Missions d’Afrique doivent y tenir la première place, une place prépondérante : ce n’est que justice. Au risque de vous surprendre, c’est justement pour vous parler d’Afrique que je vous griffonne ces quelques lignes, écho à un article du R.P. Brunetti, intitulé Tribus africaines au cœur de l’Amérique du Sud et paru, vers 1885, dans une revue missionnaire française.

Le Maroni, le plus grand des fleuves guyanais avec 600 km. environ, draine par de nombreux affluents plus du quart de la Guyane Française et une portion considérable de la Guyane hollandaise. C’est un fleuve vivant, et cela doublement: d’abord par le continuel travail de démolition et de construction auquel il se livre, et aussi par les très nombreux villages qui s’alignent sur ses rives. Sous ce double rapport, nul autre cours d’eau guyanais ne peut lui être comparé.

Sous la photo, qui, dans le N° de Janvier des Annales, représente les rapides du Mbam, on aurait aussi bien pu mettre le nom de l’un ou l’autre des 120 rapides du Maroni ; de même que l’illustration de la couverture rappelle tout à fait les carbets guyanais établis aux haltes régulières: comme en terre gabonaise, des amitiés solides s’y nouent ; et les chiques n’en sont point absentes non plus...

Outre les douze ou treize cents mulâtres, d’origine anglaise pour la plupart, dispersés sur la rive française du Maroni et ses affluents de droite, ce fleuve est surtout habité par les Paramakas, les Boschs et les Bonis, avec quelques restes de tribus indiennes. Les Indiens du Grand-Bois, Maroni Supérieur, appartiennent aux tribus Roucouyennes et Émerillons. Ils n’ont aucun rapport avec les Indiens du littoral ; Galibis pour la plupart, et ne comprennent même plus leur langue ;par contre, ils comprennent très bien le taki-taki, langue commune aux Bonis, Boschs et Paramakas, avec quelques variantes toutefois.

Jusqu’ici je ne me suis occupé que des mulâtres et il en sera ainsi pendant plusieurs mois encore , mais je n’aurai garde d’oublier tous les païens qui m’entourent.

Si les Indiens sont de vrais autochtones, tous les autres nous sont venus d’Afrique au temps de l’esclavage. Pour l’instant, je ne puis pas préciser la date de leur arrivée ici, pas plus que leur lieu d’origine sur le continent africain. Épris de liberté et s’accommodant mal du service des Maîtres, ils s’enfuirent, parfois en grand nombre, et prirent la brousse : d’où leur nom d’esclaves marrons.

Le gouvernement hollandais essaya bien de les reprendre, mais les esclaves fidèles envoyés dans ce but se joignirent au contraire aux déserteurs !
Toutes les opérations de police dirigées en ce sens furent vouées à l’échec et ne se soldèrent que par des morts d’hommes. On résolut donc de laisser ces gens tranquilles.

Ils vivent ainsi, en des villages tout à fait africains, conservant leur langue, leurs habitudes, leurs superstitions, s’occupant de leurs plantations et assurant le canotage à travers les rapides.

Outre les Samarakas, établis au centre de la Guyane hollandaise, les Boschs, sujets hollandais, ont leur quartier général, avec Grand-Man, sur le Tapanahouy, affluent de gauche du Maroni.

Les Bonis, eux, sont sujets, peut-être bientôt citoyens français. Ils se divisent en deux groupes: les Bonis prétendus plus évolués, dits Bonis d’Apatou, établis entre Saint-Laurent et le premier saut, et les Bonis du Grand Bois.

Les Paramakas sont établis sur la rive hollandaise du Moyen-Maroni.

Toutes ces tribus sont en pleine évolution, ce qui compliquera la tâche d’évangélisation. Pour elles, le Maroni n’est nullement une frontière, et cela ne facilite guère la tâche des gouvernements intéressés. Pour moi, j’ai reçu pleins pouvoirs de Monseigneur l’Evêque de la Guyane hollandaise. Les Paramakas - 1.200 environ, sont presque tous baptisés, mais ils donnent bien des déboires aux Pères Rédemptoristes qui s’en occupent pourtant depuis 1900.

Les Bonis d’Apatou - environ 200, sont eux aussi baptisés, mais sans aucune instruction religieuse. Ils ont ceci de particulier qu’ils vivent sous le régime du matriarcat: après la sœur d’Apatou, ce sont ses deux nièces qui tiennent les rênes du gouvernement !

Les Boschs - de 5 à 600, comptent à peine quelques centaines de baptisés, catholiques et protestants.

Les autres Bonis - 2.500 environ, sont presque tous païens. Fétichistes, ils restent très attachés à leurs superstitions et à leurs cultes. À force de fréquenter les civilisés, ils deviennent insolents, exigeants et encore plus paresseux qu’auparavant.
Ils ont peu d’exigences vestimentaires, restent complètement nus jusqu’à la puberté, à part, autour des reins, une ficelle qui, plus tard, maintiendra le camisa ou culimbè. Le matin, ils portent d’ordinaire le coshi, large mouchoir jeté sur les épaules.
Leur suprême élégance, avec les anneaux aux pieds et aux bras, consiste dans le tatouage kokoti et le soin qu’ils prennent de leur chevelure.
Dans leur langue originelle, bien des mots anglais ou hollandais, mal prononcés d’ordinaire, se sont glissés.

Je me permets de recommander aux prières des lecteurs des Annales cette nouvelle Mission, qui comprend des milliers de kilomètres de fleuves et de rivières. Si j’ai le grand bonheur d’en être le premier titulaire, je n’oublie pas que les Pères Neu, Kroenner, Emonet, Brunetti, y ont missionné il y a soixante et quatre-vingts ans.

Puissé-je marcher sur leur trace !

Abbé A. Bessac
Mission, du clergé colonial