L'appel de l'Incantatrice
Si, malgré les précautions prises par les parents, le nouveau-né corse tombait malade, la première pensée de la mère était de le croire Innocchiato.
Pour chasser ce mauvais sort, elle faisait brûler, dévotement et mêlés ensemble: Un rameau d'olivier, une croix de feuilles de palmier béni le jour des Rameaux, un peu d'encens et un morceau du cierge qui se trouvait en tête du triangle pendant les offices de la Semaine Sainte. Sur la fumée qui se dégageait de ce bûcher, elle promenenait le corps du petit malade en faisant force signes de croix et en disant:
- Je t'enfume et que Dieu te guérisse !
ou bien encore:
- Que ton mal se dissipe comme cette fumée !
Si malgré cela l'enfant continuait à dépérir, si le mauvais sort et le mal ne s'en allait pas, les parents appelaient l'incantatrice, toujours une vieille femme. Trois fois de suite, pendant trois jours consécutifs, la vieille procédait à ses incantations:
>Sur un peu d'eau versée au fond d'une assiette, elle laissait tomber deux ou trois gouttes d'huile dont une partie surnageait et renouvellait cette opération pendant les trois jours du 'traitement'. Par la disposition des gouttes, elle jugeait laors de la maladie. Si toute l'huile surnageait, le mal était léger et l'enfant allait guérir. Si toute l'huile coulait, l'enfant était frappé par la mort et nulle puissance humaine ne pouvait le sauver. Si la nature guérissait le bébé, c'est l'incantatrice qui en avait l'honneur ; s'il mourrait, les morts seuls étaient coupables.